La Nouvelle Société Helvétique : à la pointe du civisme

Jacques-Simon Eggly
Jacques-Simon Eggly
Ancien Président des Suisses de l'étranger, ancien CN, journaliste
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Samedi à Bienne la Nouvelle Société Helvétique a fêté ses cent ans. Si l’on prend en compte la vie de sa mère la Société Helvétique, fondée au dix huitième siècle, c’est une histoire et une vocation vénérables que l’on célébrait.  Relevons que l’Organisation des Suisses de l’étranger est une fille de la NSH, devenue autonome mais toujours en osmose patriotique. Elle fêtera son centenaire dans deux ans.

Depuis le début, la NSH se donne le devoir de concourir à la cohésion nationale à travers un fédéralisme de concordance, autour de valeurs communes. Depuis toujours, elle entend, par des appels, des manifestations, des débats surtout stimuler l’engagement civique. Il y a eu des époques où l’existence même de la Suisse était en jeu. Aujourd’hui, on n’en est pas là mais c’est une couche d’indifférence civique qui affaiblit le Corps helvétique. Cette indifférence est engluée dans une méconnaissance largement répandue de l’histoire nationale, des histoires cantonales, de la structure et du fonctionnement de nos institutions démocratiques. A Bienne on a entendu des jeunes débattre, dans un jeu à deux contre deux, sur des sujets politiques : notamment à propos de la prochaine votation sur l’immigration. Un jeu puisque certains  ont dû plaider contre leurs convictions. Mais des échanges argumentés, un dialogue respectueux. C’était réconfortant.

La NSH entend donner un nouveau souffle à l’éducation à la citoyenneté. Quelle bonne initiative. Elle veut mettre sur pied un Centre de compétence nationale réunissant tout ce qui se fait, à titre public et privé ; un Centre qui ouvrirait des pistes de collaborations fructueuses tendant vers cette régénération citoyenne. Elle imagine la mise sur pied d’équipes de jeunes observant les votations. En fait l’idée est d’établir une véritable plate forme nationale pour la formation politique. Des soutiens financiers de la Confédération, des cantons et de la société civile sont espérés.

Tout cela est-il utile en regard de ce qui a déjà été fait, de ce qui se fait et de ce qu’il est prévu de faire sous l’égide de la Conférence des Conseillers d’Etat chargés de l’Instruction publique. Naturellement la question se posait en écoutant l’exposé de la Conseillère d’Etat du Canton du Jura, Mme Elisabeth Baume-Schneider. Eh bien la réponse est oui, cela est utile pour ne pas dire nécessaire. Certes, il y a le concordat inter -cantonal romand qui prévoit dans les programmes cette formation citoyenne. On parle de réflexion sur des grands textes.  Il y a des débats parfois organisées dans des classes. On entend éduquer à la démocratie par un certain dialogue et une certaine gestion de discipline démocratique dans les écoles elles-mêmes. Mais, n’en déplaise à des notables de l’Instruction publique dans les divers cantons, il y a loin des intentions affichées à la réalité sur le terrain. Trop de témoignages concordants et persistants le démontrent pour que le déni des lacunes soit crédible. Une professeur d’histoire à Genève nous expliquait avec réalisme que c’était très difficile. Les programmes n’ont cessé de s’élargir. On a des exigences sur l’informatique, la musique, l’art, la gymnastique etc…en plus de celles sur les matières fondamentales. Les heures manquent. Le résultat c’est que sur l’histoire, et surtout l’histoire nationale et l’instruction civique l’on surfe le plus souvent d’une petite vague à l’autre sans aucune continuité chronologique. Un éminent politicien genevois d’extrême gauche nous parlait de la méconnaissance crasse d’une majorité des élus au Conseil municipal et au Grand conseil sur un minimum d’histoire du canton et du pays où ils exercent leur mandat. Aucun recul, disait-il. Hier est encore vaguement présent ; avant- hier n’existe plus.

En fait, il s’agit d’une prise de conscience à favoriser, qui devrait inciter à un certain renversement des priorités scolaires. Avant l’accumulation de connaissances vite oubliées dans des matières qui pourront être approfondies par les élèves plus tard, il faut offrir aux adolescents une culture générale et une connaissance historique, une éducation citoyenne qu’ils n’auront plus l’occasion d’obtenir dans les tourbillons professionnels ultérieurs. Et comme notre civisme est basé sur l’engagement de milice donnons aux citoyens les bases nourrissant leurs engagements de milice dans la Cité.

La section de Genève de la NSH a décidé d’adresser au Conseil d’Etat et au Grand  conseil une pétition munie de nombreuses signatures. Elle demande, précisément, que l’éducation citoyenne passant par l’étude de l’histoire nationale et cantonale et celle des Institutions redevienne une priorité ; quitte à réaménager les répartitions dans les programmes. Encore une fois que l’on ne vienne pas nous dire que c’est inutile et hors des réalités parce que le mouvement vers le possible serait officiellement lancé par des cantons en coordination. C’est comme les réformes de François Hollande : c’est bien mais insuffisant et il faut beaucoup plus vu l’enjeu qui est grave.

Oui l’enjeu est national. C’est à se demander si l’on ne devrait pas songer à une Initiative fédérale inscrivant dans la Constitution des devoirs clairement définis en matière d’éducation citoyenne. Ce ne serait pas très fédéraliste comme démarche mais le fédéralisme horizontal sera-t-il au diapason de l’enjeu qui concerne l’irrigation de notre pays précieux, de nos cantons et nos Cités par un flux civique venant de l’esprit et du coeur.

Jacques-Simon Eggly, 7 février 2014

2 commentaires

  1. Posté par Pierre-Henri Reymond le

    Je fais la même remarque que « speedyves »! Les réformes de François Hollande sont aussi bien que la cote de popularité l’indique?

  2. Posté par speedyves le

    C’est comme les réformes de François Hollande : c’est bien mais insuffisant. Seulement de les
    juger bien met deja en doute vos propres conclusions.

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