Afghanistan : flagellation publique d’une femme soupçonnée d’adultère – ce cas illustre le danger de confier la sécurité aux milices tribales

Début février, sept hommes ont été arrêtés dans le village de Rubat Hamidudin pour avoir bastonné publiquement une femme soupçonnée d’adultère.

C’était la première fois que la police de l’Etat afghan venait dans le village depuis la fin du règne de Zahir Shah, en 1973 !

Ce cas illustre les difficultés de Kaboul à assurer la sécurité et la justice pénale dans les régions reculées du pays.

L’affaire est sortie le 2 février grâce à une vidéo, où l’on voit un groupe d’hommes en train de battre une femme pour défendre l’honneur de la famille. Une femme de 22 ans en burqa est frappée à coups de bâtons par plusieurs hommes, identifiés comme étant son beau-père, son frère et ses oncles.

Tous ces hommes sont des partisans d’un « commandant local » du district de Chah Ab de Takhar – un seigneur de guerre qui est un parent de cette femme et assistait à sa flagellation.

Les milices des seigneurs de guerre sont tolérées par Kaboul depuis des années, voire financées par l’armée américaine depuis 2007, dans le cadre d’un plan controversé soutenu par l’OTAN, qui sert de mesure palliative pour assurer la protection locale tandis que Kaboul concentre ses ressources de sécurité ailleurs pour sa lutte contre les talibans.

Les forces de police officielles sont insuffisantes pour couvrir le vaste territoire montagneux de Takhar. Le village est très éloigné du centre de la province.

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Afghanistan, province de Takhar et son chef-lieu Taloqan

La femme battue dans la vidéo a été punie sur ordre du clergé local, qui a jugé qu’elle était coupable d’une liaison extraconjugale pendant que son mari était absent en Iran. La preuve était qu’elle avait passé trois heures seule à la maison avec un jeune homme de 17 ans.

Une équipe du ministère de l’Intérieur et de la Direction de la gouvernance locale enquête actuellement sur cette affaire.

Les faits remontent au mois de décembre, mais ils n’ont pas été rapportés aux autorités pendant plus de 45 jours, même pas par la victime. Les autorités n’en ont eu connaissance que quand la vidéo a fait surface sur les médias sociaux, car certaines personnes voulaient garder le secret.

L’exercice de la « justice » tribale

Cet incident n’était pas un cas isolé.

Au cours des dix derniers mois, la Commission indépendante afghane des droits de l’homme (AIHRC) a enregistré six plaintes concernant de tels jugements contre des femmes et des filles dans différentes parties de l’Afghanistan.

L’Unité d’enquête et d’évaluation en Afghanistan (AREU), organisme indépendant financé par le gouvernement et basé à Kaboul, a averti que la corruption généralisée dans les branches locales du système de justice a abouti à ce que de nombreux cas sont résolus « au niveau de la communauté, car cela est moins cher, plus rapide et plus transparent ».

« Le règlement communautaire des différends est fondé sur le droit coutumier, mêlé à la charia », conclut une étude de terrain de l’AREU.

Mais la pratique pose « des questions sur les droits de l’homme et le traitement des femmes ».

L’AREU ajoute que les insuffisances du système judiciaire officiel dans les régions éloignées – telles que le temps nécessaire pour rendre des décisions, la distance, la complexité, les dépenses et la corruption – sont des « facteurs importants cités pour la perte de confiance » dans le gouvernement central afghan.

« Il est significatif que les talibans cherchent à contrôler les mécanismes de justice comme leur première priorité après avoir obtenu le contrôle d’une zone », conclut l’AREU.

Le village de Rubat Hamidudin se trouve dans une région montagneuse qui n’avait jamais été occupée par les talibans – même en 2001, quant ils contrôlaient 90 pour cent de l’Afghanistan. C’est la zone où le célèbre commandant militaire anti-taliban Ahmad Shah Massoud avait installé son quartier général, avant d’être assassiné par deux soldats d’Al-Qaïda le 9 septembre 2001.

Mais l’influence des milices anti taliban dans ces régions, malgré son effet positif à court terme sur la sécurité, peut avoir une influence négative à long terme qui sape les intentions du gouvernement central afghan et des forces de la coalition dirigée par les Etats-Unis.

Le gouvernement afghan « ne peut pas garantir que la même situation ne se reproduira plus » dans la région Rubat Hamidudin.

Pour sa sécurité, la femme que l’on voit dans la vidéo a été transférée dans un refuge à Taloqan (chef-lieu de la province) le soir du 4 février. Sa santé physique ne semble pas avoir été affectée par l’épreuve qu’elle a vécue, selon les médecins.

Traduction libre Cenator pour LesObservateurs.ch

Source  : Radio Free Europe - Radio Liberty

6 commentaires

  1. Posté par rikiki le

    Il suffit d’être soupçonné et non accusé pour que ces barbares se fassent plaisir !

  2. Posté par Claire le

    Flagellée, seulement? Elle a eu de la chance, elle aurait dû être enterrée jusqu’à mi-corps et tuée par lapidation.
    La haine à l’égard des femmes figure dans le coran, comme l’appel au combat contre les juifs , les chrétiens et les incroyants. Ceux qui pensent parmi les posts que c’est l’affaire des Afghans se trompent, c’est aussi notre affaire, messieurs car si vous n’êtes ni chrétien, ni juif, ni incroyant, qu’êtes-vous??!! Alors ayez au moins un peu de compassion pour les malheureuses femmes qui subissent ces atrocités et que les grands médias se gardent bien de dénoncer. Je me permets de rappeler que, dans le coran, un homme = deux femmes et que les femmes sont considérées comme des esclaves et n’ont aucun droit, ni aucune éducation en Afghanistant. Comment voulez-vous éduquer des enfants à autre chose qu’à reproduire ces schémas dans ces conditions.
    Et ne me parlez pas des pseudos néo-féministes très minoritaires, qui ne sont que des collabos gauchistes, immigrationnistes et mondialistes, qui nuisent totalement à la cause des femmes.
    Je suis fatiguée d’entendre ce genre d’arguments car la majorité des femmes n’est absolument pas représentée par ces gauchistes sectaires.

  3. Posté par Le Taz le

    Si on se convertissait à l’islam, aurions-nous le droit de flageller les femmes socialistes? Je me renseigne, histoire de connaître les avantages et les inconvénients 😉

  4. Posté par Sergio le

    Pour quelles raisons obscures toutes ces officines des droits de l’homme et de la condition féminine si prompts à critiquer la Suisse ne s’en prennent-elles pas aux autorités afghanes ?

  5. Posté par Heradote le

    Après tout, qu’est-ce que ça peut nous faire ? Si ils veulent vivre comme ça, c’est leur problème et pas le nôtre. Se sont les femmes qui éduquent, les enfants, las-bas, au moins les 5 premières années, donc, à elles de jouer si elles veulent changer les choses. Ne nous mêlons pas de ces affaires et occupons-nous des nôtres.

  6. Posté par SD-Vintage le

    Le fouet, c’est déjà mieux que de la tuer, le progrès est en marche. Et puis comme dit Bergoglio, qui suis-je pour juger ?

Et vous, qu'en pensez vous ?

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